Les Frères Morvan (Ar Vreudeur Morvan en langue bretonne) sont un groupe de chanteurs bretons, trois frères originaires du village de Botcol, dans la commune de Saint-Nicodème (Côtes-d'Armor). Le trio se compose de François (né le et mort le à Botcol), Henri (né le ) et Yvon (né le ).
Au départ, ils étaient quatre agriculteurs (Yves, né en 1919, est mort en 1984). Les frères Morvan se sont constitués en un groupe de chanteurs traditionnels en 1958, avec l'arrivée des premières sonos. Le renouveau du fest-noz leur permet de se produire très souvent lors des soirées dansantes. Avec la vague bretonne des années 1970, ils se produisent dans toute la région et sur les plus grandes scènes des festivals. Cependant, ils n'ont jamais voulu quitter la Bretagne et n'ont pas eu d'enfants.
En continuant d'assurer des prestations, ils transmettent leur répertoire de chansons bretonnes (environ 80) et leur technique de chant en kan ha diskan (tuilé) aux plus jeunes, une transmission du patrimoine oral telle qu'ils l'ont reçu. Ils ont reçu plusieurs distinctions pour avoir mis en avant la culture bretonne.
La famille Morvan est constituée de quatre frères et une sœur, Marie (17 novembre 1921-2003)1. Enfants, ils vont à l'école publique à pied, à Maël-Pestivien, à trois kilomètres de la ferme familiale du village de Botcol, où se sont mariés le 9 février 1914 leurs parents, Augustine et François Morvan (chanteuse pour l'une et danseur réputé pour l'autre)2. Le breton étant la langue de la maison, les frères Morvan apprennent le français à l'école, mais apprennent leur catéchisme et les cantiques en breton3. Dès leur enfance, les frères Morvan apprennent avec leur mère Augustine Le Creff (7 juin 1896-31 août 1976) les airs et les chants qu'ils chantent par la suite4. Elle-même les avait appris de son père, Guillaume Le Creff (1852-1921), qui, sachant lire et écrire, avait pu acheter des feuilles volantes pour s'enrichir de chansons. Cette transmission orale s'est faite entre plusieurs générationsn 1. Leur mère, qu'ils appellent mamm, chantait également des gwerzioù (chant descriptif racontant une histoire) et ils en connaissaient eux-mêmes (comme Santez Jenovefa a Vrabant), « mais ce n'est pas notre spécialité, nous c'est le kan ha diskan, le chant à danser »4.
C'est également lors des fêtes et dans les champs, que le quatuor va se forger un répertoire. Lors des noces, des pardons, des enterrements, les fêtes familiales annuelles (Noël, le Nouvel an qui pouvait durer jusqu'à mars) c'est aussi l'occasion de tendre l'oreille pour apprendre des airs4. C'est d'ailleurs lors des nozvezhioù ou nozajoù (« soirées »), ces longues soirées marquant la fin des grands travaux agricoles collectifs, que les trois chanteurs vont se faire connaître. Ils prennent l'habitude d'animer ces soirées festives qui rassemblent la population des villages voisins, l'utilisation d'instruments de musique étant peu fréquente5. Elles donnent parfois lieu à des concours de danses, avec des prix alimentaires plus importants après certains pardons6. En centre-Bretagne, ils vivent les restrictions de la guerre, l'exode rural des jeunes attirés par Paris puis l'arrivée de l'électricité dans leur ferme en 1958. Les fils de courant qui permettent de garder les vaches facilitent le travail, ce qui est également le cas avec l'eau courante en 19817.
Dans les années 1950, du fait de la mécanisation et de l'exode rural, les nozvezhioù deviennent plus rares. Pourtant, c'est dans ces années qu'un marchand ambulant de Callac, présent à l'une de ces soirées, tombe sous le charme des Morvan. Il leur propose alors d'animer un fest-noz « mod nevez », organisé par le cercle de Callac à Saint-Servais le 29 novembre 19588. Après la guerre, la formation de cercles celtiques, qui commençaient à organiser des festoù-noz, leur permet de chanter plus souvent ; c'est le début d'une longue carrière d'animation de festoù-noz. Ils vont être régulièrement sollicités pour animer des soirées dansantes à proximité de leur ferme. Puis, lorsque Yvon obtient son permis de conduire en 1960, les frères se déplacent sur une plus grande zone9.
Après mai 68 et les disques d'Alan Stivell, ils reçoivent des sollicitations de toute la Bretagne (également d'ailleurs, mais ils n'ont jamais voulu sortir des limites de leur région), qu'ils sillonnent chaque année pour assurer une centaine de représentations (20 000 km par an)n 2. Cependant, leur ferme passe d'abord ; « Honnezh, n'eo ket ma micher [kananñ]. Ma micher 'zo labourat an douar »n 3 et ils refusent d'être payer car pour eux « l'important c'est de donner du plaisir aux gens »9. Cependant, ils acceptent l'idée que des groupes aux moyens techniques importants se fassent payer, car c'est leur métier.
Comme les sœurs Goadec, ils ont contribué à sortir le kan ha diskan (en français : « chant et contrechant ») de l'oubli. Leur chant le plus célèbre, Joli coucou, est devenu leur hymne. Avec leur manière de chanter typiquement bretonne et rythmée, ils font danser les Bretons sur des gavottes, plinn, fisel, kost ar c'hoad et autres pach-pi… Dans les années 1990 et 2000, malgré leur difficulté à accepter la notoriété, - « nous ne sommes pas des vedettes »10 tiennent-ils à préciser régulièrement -, ils ont eu l'honneur de fouler les plus grandes scènes des festivals de la région11. Ils sont devenus les symboles de la transmission de la chanson à danser. En témoignent, les nombreux jeunes chanteurs qu'ils accueillent avec plaisir à Botcol pour transmettre leurs chansons comportant parfois plus de cent strophes, bien ancrées dans leur « ordinateur cérébral » comme dit Yves12. « Sur scène, il nous est arrivé de voir une vingtaine de magnétophones à nos pied » raconte Yvon.
Agriculteurs avant tout, portant chemises à carreaux et casquettes à chaque représentation, les frères Morvan arpentent les festoù-noz et tracent tous les ans le sillon de charrue qui marque l'inauguration du festival des Vieilles Charrues se tenant à Carhaix-Plouguer (Finistère). Pour la première fois en 2009, le premier boys band de l'histoire bretonne joue sur la grande scène du festival, et cela en compagnie du groupe Les Tambours du Bronx, devant 60 000 personnes13. En 2001, ils chantent avec Georges Moustaki et sont félicités par Henri Salvador lors de la conférence de presse14 et, en 2002, ils partagent l'affiche avec Iggy Pop15. En 2003, c'est au Festival du bout du monde qu'ils rencontrent Manu Chao, chantant en ouverture de son concert16.
Pour leurs trente-cinq ans de kan ha diskan en 1993, Franz Wenner leur offre une statue à leur effigie, sculptée dans du granit de Gourin17. Les trois frères fêtent leurs quarante ans de scène en 199818, en présence notamment de Dan Ar Braz, pendant trois jours à Saint-Nicodème, où ils reçoivent un cadran solaire en cadeau17. En 1998, lors de la vingtième édition des Transmusicales à Rennes, François fête ses soixante-quinze ans. En septembre 2008, ils fêtent leurs cinquante ans de carrière à Saint-Nicodème, avec la présence exceptionnelle du frère aîné François19 et de Dan Ar Braz, Red Cardell et des frères Fred et Jean-Charles Guichen, notamment.
François est décédé à l'âge de 88 ans le 19 mai 201220. Enracinés dans leur terroir, les deux frères figurent parmi les quelques représentants emblématiques d’une langue et d’une culture populaire bretonne21. En 2002, ils sont faits Chevaliers des Arts et des Lettres par le ministre de la culture, en récompense de leur rôle dans la transmission du patrimoine oral breton22. En 2012, ils reçoivent de l'Institut culturel de Bretagne, à Guingamp, le collier de l'Ordre de l'Hermine, qui récompense les personnalités œuvrant pour le rayonnement de la Bretagne23. Henri et Yvon Morvan sont faits officiers de l'Ordre des Arts et des Lettres le 30 septembre 2013 à la suite de la promotion du 14 juillet24.
Le 21 février 2015, ils sont les invités d'honneur de la « Nuit de la Bretagne » à Rennes, retransmise en directe sur Paris Première 25.
Ils n'ont sorti que peu d'albums :
Ces albums sont sortis sous le label Coop Breizh.
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